Deux nuits de suite, des petits engins téléguidés ont volé au-dessus de la capitale, provoquant l’inquiétude. Pourtant, il n’y a pas grand-chose à craindre, pour le moment.
Ils semblent insaisissables. La capitale est quadrillée par les forces de l’ordre, mais les drones bourdonnent sans encombre au-dessus de Paris endormie. Dans la nuit du mardi 24 au mercredi 25 février, quelques-uns de ces objets volants téléguidés ont survolé illégalement différents quartiers de la ville. La nuit précédente déjà, cinq engins avaient été répérés par des policiers, sans que les pilotes ou opérateurs ne soient identifiés.D’après les témoignages et premiers éléments de l’enquête en cours, il s’agit de petits drones inoffensifs. Mais de quoi sont véritablement capables ces appareils vendus au grand public ?
Repérer des cibles potentielles : c’est déjà arrivé, en Syrie
N’importe quel drone en vente libre peut embarquer une caméra pour filmer son environnement. Certains en sont équipés en série, d’autres ont la puissance suffisante pour porter une GoPro, et les plus sophistiqués sont capables de supporter des caméras professionnelles pesant plusieurs kilos. Enregistrer et diffuser ces images signifie s’exposer à être pris. Un droniste s’est ainsi retrouvé au tribunal pour avoir filmé Nancy depuis le ciel. A la clé, 400 euros d’amende et un job auprès du maire.
Entre les mains d’utilisateurs malveillants, toutefois, ces drones sont parfaitement aptes à repérer des cibles d’attaques potentielles. Et cela s’est déjà produit. Le 23 août 2014, le groupe Etat islamique a mis en ligne une vidéo de propagande de 14 minutes montrant des vues aériennes d’une base de l’armée syrienne, près de Raqqa, dans le nord de la Syrie. Le Hezbollah libanais, le Hamas palestinien en possèderaient aussi, et des drones ont été utilisés dès 2011, en Libye, par des opposants au régime de Kadhafi, explique CNN (en anglais).
Lâcher des bombes : c’est très peu probable
Les Etats-Unis ont recours à des drones pour bombarder des cibles, et de son côté, l’Iran teste des « drones kamikazes », rapporte Gizmodo (en anglais). Mais il s’agit d’engins imposants, qui coûtent des dizaines de milliers d’euros. Les engins vus à Paris sont plus proches de jouets que de drones militaires. Certes, ils peuvent être équipés de caméras de bonne qualité, mais ils pèsent environ 500 grammes et ne peuvent pas en supporter beaucoup plus. Rien à voir avec les aéronefs équipés de petites roquettes que le Hamas se vante d’avoir en sa possession.
A Paris, donc, « la menace n’en est en fait pas une », estime Laurent Khong, rédacteur en chef du site spécialisé Helicomicro, interrogé par France Info. Les drones de loisir qui survolent la capitale ne sont pas assez fiables, selon lui. La météo, les interférences, leur faible autonomie (environ 15 minutes de vol), les rendent inoffensifs. « Mettre en œuvre un drone portant une charge explosive qui pourrait être utilisée dans un attentat, ça serait se compliquer la vie pour un résultat extrêmement incertain », explique-t-il au site de la radio publique.
Semer la pagaille : c’est déjà fait
Qu’il s’agisse de défis lancés entre amateurs ou d’actions coordonnées mal intentionnées, les survols illégaux, de plus en plus fréquents, sèment la pagaille. Les premiers drones repérés près de plusieurs centrales nucléaires ont alerté les autorités, qui ont déployé des radars militaires et autorisé les gendarmes à les abattre, exceptionnellement.
A Paris, les survols de la tour Eiffel ou de l’ambassade américaine ont mobilisé des policiers, qui n’ont jamais pu retrouver les opérateurs des drones. Cette impunité suscite déjà les inquiétudes. A la question du « Grand Soir 3 » publiée mardi, « faut-il interdire l’utilisation des drones ?« , 53% des 10 000 internautes ayant voté ont répondu « oui », contre 34% de « non ». Des résultats qui agacent les passionnés. « Que des activistes animés par une idéologie ou des touristes écervelés ou des abrutis en quête de sensations fortes – rayez la ou les mentions inutiles – finissent par mettre à mal une pratique de passionnés et une industrie est tout simplement inacceptable », se désole Fred, sur Helicomicro.
L’agitation et les commentaires sont liés à un contexte tendu, alors que Paris est parcourue par des militaires, dans le cadre du plan Vigipirate renforcé, depuis les attentats de janvier. En effet, en mai 2013, des amateurs avaient publié une vidéo du 13e arrondissement de Paris, sans faire de vague.
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